Horloger, journaliste, musicien, séducteur, gentilhomme de cour, affairiste, espion et marchand d'armes, Beaumarchais a le génie de la vie. Danseur, poète, entremetteur, insolent comme lui, le Figaro du Barbier de Séville tire les ficelles d'un complot amoureux entre un tuteur grognon et une pupille fine mouche. Une comédie irrésistible, étincelante. À Paris, jamais on ne s'est tant amusé au théâtre. Plus gai, plus insolent, plus subversif encore, le Figaro du Mariage, dix années durant, brave les censeurs, les ligues de vertu, le roi. En 1784, il triomphe à la Comédie-Française. C'est une des premières émeutes de la Révolution. Le valet n'accepte plus sa condition. Il défie son maître, d'égal à égal. La religion, l'aristocratie, la monarchie en sortent bafouées. Les larmes sous le rire, le célèbre monologue de Figaro résonne encore comme un des plus beaux chants de la condition humaine.
Dès sa deuxième représentation, Le Barbier de Séville étourdit Paris de jeunesse et de gaieté. Un vieux tuteur difficile à duper, une pupille fine mouche, un aristocrate prétentieux et, pour mener la danse, le valet le plus insolent, rusé et spirituel de notre répertoire. Un provocateur qui ose demander, en 1775, combien de maîtres seraient capables d'être domestiques !
On peut donc s'amuser au théâtre, et ce Figaro ferait presque oublier Molière et Marivaux. Avec une intrigue italienne, des couleurs espagnoles, des souvenirs de Renart, Pathelin ou Scapin, Beaumarchais fabrique un héros national immortel, éclatant d'intelligence et de malice, dont l'impertinence reste à ce jour inégalée. Il ne faut jamais oublier Figaro, qui nous ordonne de rire, de danser, de vivre et d'être heureux.